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mercredi 6 juin 2012

Japon Manazuru

Après le monde étrange de La Brocante Nakano, Hiromi Kawakami entraîne cette fois-ci ses lecteurs dans l’univers flottant d’une femme dont le mari est parti, un jour, et n’a plus jamais donné de ses nouvelles. Est-il avec une autre, est-il mort ? L’héroïne vit avec sa mère et sa fille, en vase clos dont elle ne sort que pour rejoindre Seiji, son amant, alors qu’elle n’a jamais cessé d’aimer son mari. Manazuru est ce village en bord de mer, où elle se réfugie, à la recherche d’elle-même. Kei, l’héroïne, parle aux fantômes et avec Kawakami, le réel se même aux fantasmes et aux rêves. Une écriture à fleur de peau pour exprimer les plus subtils des sentiments.

Manazuru, par Kawakami Hirumi, Picquier Poche, 2012

dimanche 27 mai 2012

Allemagne Peter Stamm



Ah, les bords du lac de Constance, lumineux souvenirs de vacances. Quel plaisir de retrouver cet univers dans le recueil de nouvelles de Peter Stamm ! Sauf que cet « au-delà du lac » est aussi l’envers du lac. Qu’y a-t-il derrière le décor, derrière les apparences ? Stamm explore les non-dits de la communication humaine, décèle les signes avant-coureurs de… de quoi, au fait ? Peut-être d’un certain malaise civilisationnel. Une maladie du siècle qui teinte nos existences d’absurdité, dans notre quête d’un absolu irréel. Un ton que l’on retrouve aussi chez les romanciers japonais contemporains. Ainsi qu’une exploration du couple et de la vie à deux. Huitième ouvrage de l’auteur, ce livre m’a été recommandé par la libraire de la Porte d’Anfa, à Casablanca, Amina Masnaoui. Un choix judicieux.

Au-delà du lac, par Peter Stamm, Christian Bourgois éditeur, 2012

jeudi 10 mai 2012

Maroc Kant et la petite robe rouge



Joli titre ! Lamia Berrada-Berca a eu l’excellente idée de donner la parole à une de ces femmes qui en sont privées, cachées sous le voile intégral. Un mariage arrangé, un exil en France, une petite fille, un couple qui vit ensemble sans amour, le quotidien. L’auteure a du style et raconte avec passion la découverte du désir par cette femme de trente-trois ans. Un désir bien sage : celui d’acquérir une petite robe rouge, vue dans une vitrine… la découverte aussi, de Kant et de sa philosophie. L’idée est belle, nous l’avons dit, mais comment cette analphabète pourrait-elle si vite, si facilement, lire et comprendre Kant ? Quoiqu’il en soit, on a envie d’y croire.

Kant et la petite robe rouge, par Lamia Berrada-Berca, La Cheminante, 2011

vendredi 13 avril 2012

Jérusalem






D'une plume sensible Chochana Boukhobza décrit Jérusalem aujourd'hui, le mélange tantôt hamonieux tantôt discordant des communautés. Ou vivre ensemble, au quotidien. Le violoncelliste en moi a vibré car ses deux protagonistes sont musiciennes. Rachel et Elisheva arrivent de New-York pour donner un concert. - et cela nous vaut de belles pages sur l'inspiration musicale, cet élan vers le Ciel, ses ombres aussi. L'une retrouve sa famille, ses amours. L'autre traque un ancien nazi. Une trame historique se mêle au roman sentimental vers un final dramatique et fort. Une écrivaine à découvrir.








Le troisième jour, par Chochana Boukhobza, Folio, 2011

mardi 20 mars 2012

Afrique du Sud




Avec clarté, l'anthropologue Tidiane N'Diaye, spécialiste des civilisations africaines, nous explique l'histoire de l'Afrique du Sud depuis les origines. Quelles étaient les premières peuplades, quelles migrations ont eu lieu, quelles guerres de colonisation ? Un récit passionnant, édifiant. L'auteur démonte les mécanismes de l'apartheid, de l'oppression, jusqu'au régime arc-en-ciel de Nelson Mandela. Une leçon d'histoire salutaire et nécessaire. Un devoir de mémoire. Du même auteur : Le Génocide voilé, et Les Falachas, nègres errants du peuple juif.




Par-delà les ténèbres blanches, par Tidiane N'Diaye, Continents Noirs, Gallimard. 2010

jeudi 15 mars 2012

Delphine de Vigan


Delphine de Vigan a déjà publié plusieurs romans, dont No et moi et Les heures souterraines (Livre de Poche). No et moi vient d'ailleurs d'être adapté au cinéma par Zabou Breitman : une fillette pousse ses parents à recueilir chez eux Nora, une adolescente SDF... Un film fort, le constat désespérant d'une société en pleine déliquescence. Constat identique à la lecture de ce nouveau roman en grande partie autobiographique, Rien ne s'oppose à la nuit. Flashback sur l'après-guerre, Georges et Lucille forment une belle et grande famille, huit enfants, mais le drame couve. La mort accidentelle d'un garçonnet aura des répercussions sur deux générations. La déglingue s'installe, insidieuse. Enfant-star, Lucille, la mère de Delphine, s'enfonce peu à peu dans l'alcoolisme. Aucun des membres de cette fratrie n'en sortira indemne. Delphine s'interroge, cherche à retrouver l'origine, comprendre. En même temps, elle décrit une société européenne en pleine décadence, perte des repères.

Rien ne s'oppose à la nuit, par Delphine de Vigan, JC Lattès, Prix France Télévisions et Prix Renaudot des Lycéens, 2011

lundi 27 février 2012

Le luth

Raconte-moi le luth

Essadek, notre jeune héros, nous invite dans le monde merveilleux du luth. Il partage la passion de ses ancêtres pour cet instrument et n'a qu'un seul rêve : continuer la lignée dont il est issu. A travers le cheminement et l'apprentissage d'Essadek les multiples facettes de cet instrument magique nous sont contées. Nous sommes avec lui, hypnotisés par l'histoire du luth et ses légendes, voyageant à travers tout l'Orient, de Bagdad à Tétouan, sans oublier l'Andalousie créative et la magie de ses rythmes. Essadek et son grand-père nous emmènent dans l'espace er dans le temps. Nous partageons avec eux les secrets des techniques, la fabrication minutieuse et l'évolution de l'instrument. Nous partons à la rencontre des plus grands musiciens et ravivons la mémoire de ce patrimoine.

Texte : Amina Alaoui & Mehdi de Graincourt
Illustrations : Arnaud Cayuela
Publié avec le soutien du Ministère de la Culture (Maroc)
éditions Yanbow al Kitab
http://www.livremoi.ma/ et Fnac

Ibn Battouta



Ibn Battouta (1304-1369)

Biographie du grand voyageur de l'Islam :


"Le salut et la paix soient sur vous. Je m'appelle Abu Abd Allah Muhammad ibn Abd Allah El-Louati. Des hauteurs de Tanger, ville où je suis né en 682 (soit le 24 février 1304), j'aimais contempler l'infini de l'Atlantique. Et de l'autre côté du détroit, l'Andalousie. Grandir à Tanger m'avait donné l'irrésistible envie de partir à la découverte du monde. La connaissance doit être cherchée jusqu'en Chine..."



texte : Mehdi de Graincourt

illustré par 12 tableaux (technique mixte sur bois) : Mehdi de Graincourt

dessins : Mireille Goëttel

Publié avec le soutien de la Fondation BMCI (groupe BNP Paribas)

Prix Grand Atlas Jeunesse 2011 remis par l'Ambassade de France

éditions Yanbow al Kitab

dimanche 26 février 2012

Ibn al Arabi in english




On the path of Ibn al Arabi, the revelations in Fez and Marrakesh








With a preface from Professor Jibrail Mandel Khan, Khalifa of the Sufi Halveti Brotherhood in Italy and founder of the International Islamic University Ibn Rushd in Cordoba, author of a large number of works of reference

Ibn al Arabi

Biographie du soufi andalou Ibn al Arabî
beau livre

Senso Unico
éditions collector
contact : mdegraincourt@gmail.com

Enfance

Amadeus n'est pas un ours


Près de chez Mehdi, à Marrakech, il y a un zoo. Dans une cage, restée longtemps vide, un ours nouveau venu. Il s'appelle Jebbar. Mehdi lui rend visite tous les jours. Leur complicité devient telle qu'ils peuvent communiquer entre eux sans prononcer un mot. Par télépathie. Et puis, un jour, Jebbar a disparu de sa cage! Que s'est-il passé !


Publié avec le concours de l'Agence intergouvernementale de la Francophonie, un livre pour apprendre à parler de la mort aux enfants

texte : Mehdi de Graincourt
Illustrations : Jean-Paul Favreau
éditions Yomad,
www.livremoi.ma

jeudi 23 février 2012

lundi 20 février 2012

Leur Maroc

Leur Maroc, regards d’écrivains, artistes, voyageurs, venus d’ailleurs, connaît un tel succès que Malika éditions vient de le publier en version brochée, accessible au plus grand nombre, présentée au Salon du Livre de Casablanca.

Même format, même papier, impression à l’identique. Un vaste panorama richement illustré de ceux et celles, écrivains, artistes, peintres, qui au cours des siècles derniers ont aimé notre pays et ont voulu partager leur amour et leur enthousiasme. Par l’écriture, la peinture, la création, la chanson… Une fresque de portraits, souvenirs et érudition mêlés, pour une lecture chargée d’émotion.



Leur Maroc, regards d’écrivains, artistes, voyageurs, venus d’ailleurs, par Mehdi de Graincourt, Malika Editions, 256 pages


avec plus de 40 tableaux (technique mixte sur bois) de Mehdi de Graincourt



Publié avec le soutien de la Fondation BMCI (Groupe BNP Paribas)

mercredi 15 février 2012

Chine Xinran



Née à Pékin, Xinran a animé des années durant une émission de radio consacrée aux paroles de femmes qui l’a rendue célèbre dans la Chine entière. Elle a recueilli ainsi de nombreux témoignages sur le vif qui lui ont permis d’écrire plusieurs de ses ouvrages, dont Chinoises. La riche culture chinoise est encore trop méconnue de par le monde. La lecture de tels romans et de ces témoignages nous aide à la connaître et mieux la comprendre.


Trois, Cinq et Six -oui, elles se prénomment ainsi, par leur ordre d’arrivée !- sont des campagnardes chinoises, de simples « baguettes » quand les garçons sont les « poutres » de la maison. Autant dire qu’aux yeux de la société et même de leurs parents, elles ne valent pas grand-chose. Elles vont cependant relever le défi d’exister, partir à la ville, travailler. Se prouver à elles-mêmes et aux autres qu’elles peuvent réussir. Xinran écrit avec le cœur, avec simplicité et sincérité. Atour de ces témoignages réels, elle construit un roman profondément humain, touchant, jamais larmoyant et empli d’humour. Une incursion dans la Chine d’aujourd’hui.

Baguettes chinoises, par Xinran, Picquier Poche, 2011


Dans son poignant Funérailles célestes Xinran retrace les relations mouvementées entre la Chine et le Tibet depuis 1956 au travers d’une superbe histoire d’amour. Jeunes médecins, Wen et son époux Kejun sont séparés quand celui-ci s’enrôle dans l’armée. Wen part à sa recherche et durant sa très longue quête elle vivra au sein d’une famille nomade, dont elle partagera le quotidien. Même si le récit de Xinran est empreint d’une certaine naïveté, comme le note Claude B. Levenson dans sa postface, il n’en reste pas moins que ce « regard d’une Chinoise sur le Tibet » reste une splendide épopée.

Funérailles célestes, par Xinran, Picquier poche, 2012

dimanche 12 février 2012

Femmes et drapés




Ce splendide ouvrage qui vient de paraître aux éditions Malika allie la poésie des photographies d’Hervé Nègre à la qualité littéraire et ethnologique du texte de Claire Cécile Mitarte. Cette étude érudite sur les drapés des femmes maures, réalisée à l'initiative de l'Agence du Sud, entraîne le lecteur dans un passionnant voyage : « Tout au long de la côte atlantique du Sahara, depuis les contreforts de l’Atlas jusqu’aux rives du fleuve Sénégal, les femmes se drapent d’une même mesure d’étoffe qu’elles agencent d’un semblable mouvement. La Melhfa , dont le radical arabe signifie « couvrir », « envelopper », s’enroule autour du corps pour être nouée aux épaules avant de recouvrir les cheveux, l’extrémité du tissu étant rejetée en arrière par-dessus l’épaule gauche ».



El Melhfa, texte de Claire Cécile Mitarte. photographies d’Hervé Négre, préface de Pierre Bergé, Malika éditions, 2012

mercredi 25 janvier 2012

Soufisme Rûmi


Quelle joie de retrouver Jalal-al-Din Rûmi dans les pages de ce beau roman d’Elif Shafak ! Rûmi, poète, mystique, soufi du XIIème siècle, dont la voix résonne toujours avec la même profonde acuité aujourd’hui. Rûmi dont il faut avoir lu le Mesnevi. Installée en Turquie, Elif Shafak a déjà publié plusieurs livres, La bâtarde d’Istanbul, Bonbon Palace et Lait noir, tous parus en français dans la collection 10/18. Dans Soufi mon amour, elle sait prendre les accents de la modernité afin d’amener les lecteurs contemporains à la découverte de l’univers de Rûmi. Lectrice pour une maison d’édition, Ella, son héroïne américaine, mène la vie d’une desperate housewife, jusqu’à ce qu’elle lise le manuscrit d’un certain Aziz. Son destin va basculer. .. Alternant les allers et retours entre le XXIème siècle et le passé, ce roman fort bien construit se lit d’une traite. Tour à tour, l’entourage de Rûmi prend la parole : sa femme, ses fils, une prostituée, ses ennemis et bien sûr Shams de Tabriz Shams dont les quarante règles sont à noter sur votre agenda. Celle-ci par exemple : « Il n’est jamais trop tard pour se demander : « Suis-je prêt à changer de vie ? Suis-je prêt à changer intérieurement ?... » Un livre lumineux.


Elif Shafak, Soufi mon amour, 10/18, 2011

lundi 23 janvier 2012

Eric Chauvier Anthropologie




En France, à un carrefour, le narrateur remarque une jeune fille qui mendie entre les voitures. Qui est-elle ? Il n’aura de cesse de la revoir, revenant chaque jour à cet endroit. Il vient avec des amis, étudie leurs réactions – celle-là grimace, celui-ci refuse de voir- et se livre ainsi à une étude –un jeu ?- anthropologique. Celle qu’il nomme tout d’abord X s’appelle-t-elle Ana ou bien Anne ? Est-elle Rom ? Est-ce une une fugueuse issue d’une famille aisée ? A grand renfort de citations, Bloch, Bourdieu, Borgès, Breton, Corbin, Foucault, Freud, Levinas, Wittgenstein…- Eric Chauvier nous entraîne dans sa quête. Il a le mérite de faire réfléchir et réagir ses lecteurs : oui, ces mendiants postés à mon carrefour, qui sont-ils ? Cette vieille femme en haillons, cet Africain handicapé, ce gamin ? Est-ce que je refuse de les voir ? Est-ce que je leur donne une pièce puis néglige de savoir qui ils sont ? Une réflexion à approfondir sur la société et ceux qui sont en marge.
Eric Chauvier, Antropologie, éditions Allia, réédition 2011

vendredi 20 janvier 2012

Entretien Maya Shane : La couleur de l'espoir

Maya Shane est une femme au grand coeur. Généreuse, elle donne autour d'elle joie et réconfort. A Casablanca, elle est la marraine de l'orphelinat Dar Al Atfal Bernoussi. Passionnée, elle se livre au fil de ses chansons. Orientale, elle l'est de toute son âme. Maya est ambassadrice de l'hôtel Art Palace -toujours à Casablanca- où elle s'est produite le 31 décembre 2011. Elle y a conquis son public, tout comme celui du Colony Theatre, quelques jours plus tôt à Miami. Son troisième album vient de sortir, si joliment nommé "La couleur de l'espoir".


Bonjour Maya. Tu viens de sortir un nouvel album, le troisième. La couleur de l’espoir. C’est un très beau titre. Qu’est-ce que cela évoque pour toi ?

L’Espoir, Mehdi, tous mes espoirs sont dans ce titre, l’espoir de paix, de bonheur, l’espoir que ma voix se fasse entendre dans le monde entier, tous les espoirs !

Les couleurs, qu’elles sont-elles ?

Les couleurs de la vie, de la joie, les couleurs de la bonne humeur, de l’Orient, du jasmin, de mon univers des mille et une nuits

Qu’est-ce que tu ressens lorsque tu es au Maroc ?

Comme à chaque fois que je viens au Maroc il ya une alchimie, il y a quelque chose qui se passe avec le Maroc et les Marocains. J’ai fait la promotion de mon premier album ici, ça m’a porté bonheur. Maintenant j’en suis à mon troisième et donc ça va de soit que je commence ma promo au Maroc, sinon je ne peux pas commencer.

D’ailleurs, on t’attend tous bientôt en concert au Maroc.

Très bientôt. Je suis venue exprès pour ça. Je suis en train de visiter les salles et j’espère en 2012 sans faute faire au moins deux ou trois dates sur le Maroc.

C’est ce que nous souhaitons tous !

Tu es marraine de plusieurs associations. Tu es très investie dans la vie associative.
Il y a l’association Femmes et handicap qui a pour but de faire valoir les arts au travers des handicaps. C’est très important pour moi. Et il y a aussi l’association Paroles de femmes, où je soutiens toutes les femmes en difficulté, que ce soit psychologique ou vraiment matériel. Cette association prend les femmes en charge Et Little dream qui est une association pour les enfants, de façon à pouvoir leur donner et la scolarité et les vacances et les habits, tout ce dont un enfant défavorisé a besoin.

Un message spécialement pour les lecteurs et les lectrices d’eTnic’s ?

Le magazine eTnics est magnifique, vraiment magnifique ! Je suis très fière d’être dans ce magazine. Je lui souhaite une longue vie et vraiment beaucoup de succès.
D’autant qu’eTnic’s ce ne sont que des coups de cœur et nous sommes d’autant plus fiers d’avoir été les premiers à parler de toi, pour ton premier album.

Ca m’a fait super plaisir. Merci .A bientôt !
Merci, Maya. A bientôt !

Retrouvez Maya Shane dans le n°1 d’eTnic’s, en vente dans tous les kiosques

et sur mayashane.com. Pour la contacter joindre :

CARLOS PEIRATS
DESERT & DIVAS PRODUCTIONS.Concerts, corporates and special events promoter.
Press and medias promotion.
Morocco and Middle east territories.
TEL 00.212.6.61325347 / 00.212.6.64626014
France : 00 33 6 14 77 08 57

jeudi 19 janvier 2012

Elisa Chimenti (1883-1969) : Anthologie



Napolitaine, Elisa Chimenti a vécu une soixantaine d’années à Tanger, sa ville de cœur. Fille du médecin personnel du Sultan Moulay Hassan 1er, enseignante, elle a fondé avec sa mère la première école italienne à Tanger. Journaliste, écrivain, elle fut et demeure un témoin majeur de la ville du détroit. La première aussi à avoir créé un café littéraire chez elle, dans sa maison toujours ouverte à ses amis et à quelques autres. Elle préférait partager le peu qu’elle n’avait pas, de l’hospitalité des gens vrais. Et elle écrivait sans cesse, sur tout et sur tous. Sur Tanger et les Tangérois surtout. Ses œuvres, des nouvelles, contes et légendes, recueil de chants poétiques, un roman et des récits, sont un témoignage majeur, une somme et une mine de renseignements historiques et sociologique. D’une grande qualité littéraire, que beaucoup pourraient prendre en exemple. Pour les amoureux de Tanger, son histoire, ses histoires, cet ouvrage rassemble l’anthologie de l’auteur. Un livre complet, très agréablement présenté, que l’on peut emmener pour un voyage au long cours. Près de neuf cents pages plus passionnantes les unes que les autres. La préface d’Ahmed Benchekroun est un hommage émouvant. Et la postface de Maria Pia Tamburlini retrace avec tact délicatesse la vie de cette grande dame.

Elisa Chimenti. Anthologie. Editions du Sirocco & Senso Unico Editions

mercredi 18 janvier 2012

Entretien : Karine Joseph, fondatrice des éditions du Sirocco





Passionnée de littérature, Karine Joseph est la fondatrice des éditions du Sirocco, à Casablanca. Son James McBey et le Maroc a obtenu le prix Graincourt du beau livre 2009. Dernières publications, le beau livre Nass el Ghiwane avec les éditions Senso-Unico, Stories de Tanger, de Mohamed Mrabet et Simon-Pierre Hamelin, ainsi qu'une anthologie d’Elisa Chimenti.

Depuis quand vivez-vous au Maroc ?

Depuis l’âge de 6 ans, dans ma grande et magnifique famille marocaine, un cadeau inestimable de la vie, avec une mère et un père merveilleux, des sœurs et un frère.

Quand avez-vous créé votre maison d’édition ?

En 2007, après avoir brièvement enseigné et travaillé pendant des années dans un tout autre domaine, l’assurance.

Quel cheminement vous a-t-il amenée à ce choix ?

J’en rêvais depuis longtemps. Les livres, la lecture, m’accompagnent depuis toujours. Pendant mes études en France j’avais fait un stage dans une grande maison d’édition. Quand j’ai décidé de me lancer en 2007, le désir d’être éditrice était toujours aussi présent. Au Maroc, parce que j’y vis. Même si les premiers éditeurs marocains que j’ai rencontrés m’ont brossé un tableau noir de leur activité. Je me suis entêtée !

Votre premier bilan éditorial à ce jour, personnel, financier, professionnel ?

Sur un plan personnel et professionnel, c’est un plaisir, un enrichissement immenses ! Financier ? No comment ! Disons juste que je m’accroche.

Quels sont les ouvrages que vous avez publiés depuis la création des Editions du Sirocco ?

J’ai commencé par des rééditions de livres anciens sur le Maroc ; les Contes & Légendes populaires du Maroc, de la Doctoresse Légey, qui datent de 1926, et son Essai de folklore marocain, de 1926 également ; les Pratiques des harems marocains d’Aline de Lens de 1925, un recueil de recettes traditionnelles, ou « remèdes », ceux que les femmes se transmettent, oralement, depuis des générations pour se soigner, s’embellir, pour séduire et envoûter les hommes aussi, pour éloigner ou se protéger des mauvais esprits, un monde secret et fascinant !
On m’a d’ailleurs reproché, gentiment, de dévoiler ces secrets de femmes ! Ce qui est drôle, c’est qu’au Salon du livre de Tanger, beaucoup d’hommes ont acheté le livre !
Je présente ces trois-là comme une trilogie de la culture traditionnelle et populaire du Maroc. Ces livres édités en France à l’origine, étaient épuisés depuis longtemps. Le succès des Contes & Légendes, qui en sont à leur second tirage, me fait dire que le choix de les rééditer a été le bon. Ces livres, leur contenu, font partie du patrimoine.
Après, je suis passée à un beau livre. Un projet qui me tenait à cœur depuis longtemps aussi, faire découvrir, ou redécouvrir, les magnifiques œuvres « marocaines » du peintre et graveur écossais James McBey.

Vos derniers ouvrages publiés ?

La traduction en français du livre de l’historien Abdelhadi Tazi, Mon premier voyage en France – 1952, paru en arabe en 2008 chez Daralharf ; c’est la première fois que l’un de ses livres est traduit arabe, alors qu’il est traduit dans beaucoup d’autres langues, même en chinois ! Un grand Monsieur, plein d’humour, un grand esprit, tellement ouvert !
Les Stories de Tanger, de Mohamed Mrabet et Simon-Pierre Hamelin, qui vient de paraître. J’en suis également très fière parce que c’est la première fois que Mohamed Mrabet est édité au Maroc. C’est un joli livre illustré des peintures de Mrabet, leurs reproductions de belle qualité et les « stories », c’est comme ça que Mrabet appelle les histoires qu’il raconte, sont vraiment délicieuses ! En Simon-Pierre Hamelin, qui transcrit ses histoires, comme Paul Bowles l’avait fait dans les années 60, Mrabet a retrouvé un « complice littéraire », et grâce à lui nous retrouvons ce très bel imaginaire.
L'avant-dernier livre paru est une anthologie d’une auteure italienne de Tanger, Elisa Chimenti, dont on vient de célébrer le 40ème anniversaire de la disparition par la création, notamment, d’une fondation Elisa Chimenti, à l’initiative du Consulat d’Italie. Cette dame a vécu presque 60 ans à Tanger, elle y était enseignante, journaliste et écrivain. Polyglotte, elle parlait l’arabe parfaitement. Tout ce qu’elle a écrit a pour contexte le Maroc.
Ce livre a été réalisé en coédition avec la maison d’édition marocaine Senso Unico, tout comme notre dernier beau livre sur le groupe mythique Nass el Ghiwane. Cette collaboration a été très enrichissante.

Quelles raisons guident vos choix éditoriaux ?

Les découvertes coup de cœur, souvent issues de rencontres, que je souhaite partager. La ligne que je me suis fixée est d’éditer des livres qui auront toujours un lien avec le Maroc, des œuvres d’hier ou d’aujourd’hui. Je dois cependant tenir compte du « plaisir et de la nécessité ».


Comment financez-vous vos publications ?


Jusqu’à présent, tous les livres des Editions du Sirocco ont été financés par des fonds propres.
Vos motifs de satisfaction ?La rencontre de personnes passionnées et passionnantes, généreuses, qui partagent leurs connaissances… ça c’est fabuleux ! Les Editions du Sirocco commencent à être connues, reconnues, évidemment j’en suis très heureuse, cela m’encourage à persévérer.

Vos motifs d’insatisfaction ?

Il y en a, bien sûr ! Cette fameuse « chaîne du livre » a encore du chemin à faire pour être tout à fait professionnelle. Je suis convaincue qu’il y a ici des lecteurs, des personnes qui aiment, achètent et lisent des livres, et même les livres chers. Le prix du livre ne va pas seulement à l’éditeur, par contre c’est lui qui le finance entièrement, souvent.
C’est aussi et d’abord à l’Etat de rendre les livres, la lecture, accessibles, par le biais des bibliothèques, forcément. Là, oui, je serais prête à réduire encore les gains déjà très faibles. Ce métier est un métier de passion, on ne le fait pas en général pour gagner beaucoup d’argent! Mais il faut pouvoir en vivre, sinon on ne fait plus de livres.
Je regrette aussi que les livres édités par des maisons marocaines n’aient pas plus de visibilité, aussi bien dans les points de vente que dans la presse. Quand ils en ont, ils se vendent !
Et puis l’information aux professionnels du livre par les divers organismes de la culture est inexistante, du moins en ce qui me concerne. Je dois sans cesse aller à la pêche aux informations, pour seulement demander à être informée des diverses manifestations nous concernant. Rien ! Aucun retour ! J’avoue que je ne comprends pas.

Vos projets ?

La traduction d’un récit de voyage au Maroc d’un auteur anglais, jamais traduit en français, deux projets de livres « jeunesse », des documentaires. Il y a beaucoup de beaux sujets à traiter sur le Maroc, dans ce secteur. Les Editions du Sirocco participeront aussi à plusieurs salons du livre cette année, ici et ailleurs.



Vous avez assité au dernier Salon Maghreb des Livres à Paris. Vos impressions ?

C'était la première fois que je m'y rendais, comme visiteuse et aussi comme éditrice. Et mes livres étaient sur les tables. En plus du plaisir d'être dans un endroit magnifique, la Cité Nationale de l'Histoire de l'Immigration, voir autant de monde venir à un salon du livre, regarder, feuilleter, acheter les livres, les faire dédicacer, assister aux cafés littéraires... ne peut que combler un éditeur, une vraie fête ! J'ai pu voir comme les visiteurs l'ensemble de la production maghrébine, me rendre compte de sa richesse, en auteurs et en maisons d'édition. J'ai pu rencontrer d'autres éditeurs, des auteurs, et de ces contacts naîtront peut-être d'autres livres. Ces échanges sont toujours très stimulants.

Ecouter Natalie Cole Ask a woman who knows




Elle est belle, sculpturale, spirituelle, elle a un talent fou. Normal, me direz-vous, elle est née dans la musique, bercée de soul et de jazz : Natalie est la fille du grand Nat King Cole. Elle n’a pas seulement hérité du sourire charmeur de son père, elle l’a vu, écouté, travailler depuis son plus jeune âge et elle a appris à ses côtés. Il y a plus de dix ans, déjà, son premier album, Unforgetable, rencontre un magnifique succès. C’est un hommage touchant, sincère, vibrant à son père. Avec ce nouvel opus, Ask a woman who knows –Demandez à une femme qui sait- elle interprète, s’approprie, des chansons connues comme My baby just cares for me, ou nombre de perles rares du jazz, telle la chanson titre. Le cd est un bijou à écouter en boucle. Mais le Dvd avec le concert live offre plus encore. Car, un jour, dans un grand magasin de New York, Natalie rencontre par hasard l’autre diva du jazz, la blonde Diana Krall. Elle connaissait sa carrière, était curieuse. Elles se parlent, tombent en amitié comme on tombe amoureux. Le résultat : deux magnifiques duos, où leurs voix se répondent et se complètent à merveille. Dans l’entretien bonus, Natalie Cole se montre sincère, naturelle, craquante en un mot ! Une belle personnalité.
Natalie Cole Ask a woman who knows Cd & Dvd BBC

Polar et fengshui




Avez-vous entendu parler du fengshui ? En chinois, cela signifie « le vent et l'eau ». Il s’agit d’un art millénaire chinois dont le but est d'harmoniser l'énergie d'un lieu... Si vous ne connaissez pas encore, allez vite faire des recherches sur internet, c’est passionnant. Sachez que les plus grandes sociétés internationales y font appel ! Wong est un maître de fengshui si renommé que les Britanniques l’invitent en Occident afin d’y expertiser des avions. Peut-être même sera-t-il amené à rencontrer la Reine Elisabeth ! Avec beaucoup d’humour, Nury Vittachi brosse les aventures délirantes de Wong dans cette série « Une enquête du maître de fengshui ». Sachez que tous les préceptes de la discipline sont respectés et que vous les apprendrez au fil des pages tout en vous délectant de ce polar pas comme les autres. Idéal pour se détendre tout en s’amusant.

Le maître de fengshui est à l’ouest. Par Nury Vittachi. Picquier Poche

Daphne du Maurier, L’ombre des secrets




Le maître du septième art Alfred Hitchcock a adapté à l’écran ses succès littéraires, Rebecca, L’auberge de la Jamaïque et ce film à suspense que nous avons tous vu avec angoisse, Les oiseaux. Descendante de nobles français qui ont fui la France de la révolution, Daphne du Maurier (1907-1989) naît en Angleterre, de parents artistes et comédiens, une bonne base pour une carrière littéraire. Qui sera immense, reconnue, puissante et originale. Dans l’univers de Daphne, tout est étrange, irréel, mystérieux, fantastique. Les apparences côtoient la déraison, la folie même, comme s’il s’agissait du même registre : mais après tout, ou est la vérité, le mensonge, dans notre quotidien ? L’ombre des secrets est un recueil de romans et nouvelles, Le bouc émissaire, La maison sur le rivage, Le vol du faucon, Le pommier, Les oiseaux, Ne vous retournez pas, Pas après minuit, Les verres bleus, L’alibi. Substitution d’identité, voyages dans le temps, réincarnation, machinations, illusions, dérèglement des sens : suspense et mystères. La tension nerveuse nous guette. J’adore la présentation de la collection Omnibus, qui me donne en un seul volume souple et facile à emmener partout, 1200 pages de lecture envoûtante.

L’ombre des secrets. Par Daphne du Maurier. Omnibus

Ecouter Martirio : Flor de Piel



Rien de tel pour rester de bonne humeur que d’écouter le dernier opus de Martirio ! L’Espagne n’a pas que des footballeurs de talent, c’est un vivier de créations, de joie de vivre et de bonheur ! Depuis sa movida au début des années quatre-vingts, elle ne cesse de nous séduire et de nous étonner. Et depuis une quinzaine d’années aussi, Martirio chante et nous enchante, chef de file du nouveau flamenco. Ou comment adapter le classique à l’air du temps, le deviner, le ressentir, le faire partager et souvent le devancer. Martirio y place ses tempos modernes, jazz, et même pop de temps en temps. On est ébloui et nos oreilles en redemandent ! Nous avions Oum Kalthoum et ses célèbres lunettes noires, ils ont Martirio et ses lunettes, leur grande dame à eux.
Flor de Piel, CD, par Martirio.

mardi 17 janvier 2012

Japon Kawakami Hiromi,



"La brocante Nakano" a été mon livre de chevet. J'ai adoré ! Quelle subtilité et finesse dans la description. Je suis entré dans ce petit monde... Dans un magasin de brocante gravitent quelques personnages, le patron, sa sœur, ses employés. L’auteur décrit leur quotidien par petites touches, ainsi que leurs histoires d’amour, celles qui naissent dans la maladresse, celle qui s’étiolent et meurent. Née à Tokyo en 1958, Kawakami Hiromi voit sa nouvelle Hebi o fumu couronnée en 1996 par le prix Akutagawa. En 1999, elle obtient le prix des Deux Magots et le premier prix Pascal des jeunes auteurs de nouvelles. En 2000 Oboreru reçoit le prix de littérature féminine. En 2001 Sensei no kaban, Les Années douces, est couronné par le grand prix Tanizaki. Kawakami Hiromi a su s’imposer dans le monde littéraire japonais par la tonalité très particulière de son style, à la fois simple et subtil dont les thèmes privilégiés sont le charme de la métamorphose, l’amour et la sexualité. A lire du même auteur, chez Picquier, Cette lumière qui vient de la mer, Les années douces et Manazuru.
La Brocante Nakano, par Kawakami Hiromi, Picquier Poche,

Développement personnel



Formidable, la collection Evolution en poche chez Pocket ! Ces livres ne sont pas chers et le format très pratique : on peut les avoir au fond de son sac et les consulter à tout moment. Vous avez envie d’être heureux, de vous sentir bien, léger dans vos baskets, Monsieur, à l’aise dans vos escarpins, Madame ? Eh bien, Guy Finley vous offre la solution : le lâcher prise ! Exemples à l’appui, votre coach personnel vous donne ses conseils. Beaucoup d’attitudes concrètes tirées de la vie réelle, beaucoup de questions aussi, avec autant de solutions. Cela paraît tout simple mais je vous conseille de ne pas dépasser la dose d’un seul chapitre par jour, le temps de bien assimiler ces leçons et surtout de les mettre en pratique. Car c’est à une véritable révolution personnelle que l’auteur vous invite. Remettre en cause le formatage de la société, de l’éducation familiale. Rassurez-vous, tout cela est compatible avec l’islam. Il s’agit avant tout d’une démarche psychologique et pas religieuse. Voici un livre qui vous propose de vous libérer de tous les liens qui vous entravent. Prêt pour le prochain départ de la navette spatiale ?

Les clefs pour lâcher prise. Par Guy Finley. Editions Pocket Evolution.

Céline





Remarquable biographie qu’Yves Buin consacre à Céline ! Il faut en effet beaucoup de tact pour évoquer la vie si controversée de l’écrivain sans tomber dans la polémique ou le mensonge. Né en 1894, Louis-Ferdinand Destouches part à Londres puis en Afrique, après avoir été blessé et décoré pour bravoure lors de la première guerre mondiale. Après des études tardives de médecine, il travaille pour la Fondation Rockefeller auprès de la Société des Nations, en 1924. Puis devenu médecin dans un dispensaire, il commence à écrire ce qui sera son chef d’œuvre, Voyage au bout de la nuit. Publié sous le pseudonyme de Céline, il obtiendra en 32 le Prix Renaudot. Dès 37, il écrit des pamphlets antisémites tout en s’élevant contre la guerre qu’il pressent. En 44, il se réfugie en Allemagne avec sa femme, puis au Danemark, où il sera incarcéré. Après son retour en France, il sera finalement amnistié et continuera à écrire et publier. Reconnu comme un écrivain majeur du XXème siècle, il aura revivifié la littérature en introduisant avec force le langage parlé dans l’écrit. La plus grande partie de son œuvre est disponible en poche, aux éditions Folio. Dans le prisme de son essai, Yves Buin nous fait relire une page troublée de l’Histoire. Passionnant.
Céline. Par Yves Buin. Folio Biographies

Mohamed Mrabet Stories


Mohamed Mrabet… ce nom vous dit quelque chose. Bien sûr ! Son talent de conteur fut révélé dans les années soixante par Paul Bowles, à qui il dicta ses récits, dont le fameux « Citron ». Mrabet, le pêcheur de la plage de Merkala qui était aussi peintre accéda ainsi à la célébrité. Ses œuvres picturales d’art brut figurent dans de prestigieuses collections privées. Ses livres sont traduits dans de nombreuses langues. Et pourtant jusqu’à aujourd’hui, ses « stories », comme il les nomme lui-même, n’avaient jamais été publiées au Maroc ! C’est chose faite grâce aux éditions du Sirocco, et c’est un événement. Quel plaisir de retrouver l’univers fabuleux, tellurique de Mrabet, son humour, ses clins d’œil, où se mêlent déraison et dérision. Sorts et sortilèges. Les poissons parlent, les sirènes sortent de l’océan et la folie avec douceur et poésie se fait ordinaire. Recueillies jour après jour avec sensibilité par Simon-Pierre Hamelin, ces stories éditées ici en français et en anglais ont un charme fou. J’ai commencé ma lecture et je n’ai pu l’arrêter avant d’avoir achevé ce bel ouvrage, magnifiquement illustré par des œuvres récentes de l’artiste. Magique !
Stories de Tanger par Mohamed Mrabet et Simon-Pierre Hamelin, éditions du Sirocco,


Vita Sackville-West




Comment se fait-il qu’on nous cache de tels bijoux ? Publié en 1931 en anglais, Toute passion abolie vient à peine d’être traduit et publié en Français, au Livre de Poche. Vita Sackville-West (1892-1962) fut intimement liée au groupe de Bloomsbury et à Leonard et Virginia Woolf qui disaient que ce livre était le meilleur de l’auteure. Nous voici dans l’Angleterre des années 30, un milieu aristocratique d’une rare élégance. Lady Slane, quatre-vingt-huit ans, se penche sur son passé prestigieux. Epouse de Lord Slane, elle fut vice-reine de l’Empire des Indes où ils représentèrent la couronne britannique. Prétexte à des flash-back d’une poésie inouïe qui nous replongent dans l’Inde fascinante des années 1880, chasse au tigre, voyages en chariots bâchés, vol des oiseaux… A Londres, cinquante ans plus tard, Lady Slane décide de vivre pour elle-même, prendre son temps pour se souvenir et rêver. Les mots, les scènes, les événements sont d’un charme et d’une finesse retro insensés. J’ai adoré. Je n’étais pas tombé sous l’emprise aussi envoûtante d’un roman depuis bien longtemps. Ode au raffinement, à une classe et un art de vivre à jamais perdus ?

Toute passion abolie. Vita Sackville-West. Le Livre de Poche

Chronique Lire et dessiner

C'est au Musée de Marrakech que j'ai découvert les oeuvres somptueuses de Chayan Khoi. L’artiste nous enchante par ses photos oniriques, peintures retouchées. Il nous prend par la main et nous entraîne dans un monde imaginaire que l’on souhaiterait être la Terre. En parallèle, il présente ses journaux de voyages. Ce ne sont pas de simples carnets mais de véritables œuvres d’art, immenses, pesant chacune plusieurs kilos. Il dessine, écrit poèmes et proses, colle des photographies, scènes, paysages, personnes rencontrées au cours de ses périples. Il y colle des parures de plumes, des bijoux, des colliers, des grigris et talismans. Graffitis et tags, enluminures et arabesques. Le résultat est magique, vraiment. Merci à la Fondation Omar Benjelloun et à sa dynamique Présidente amoureuse d’art contemporain de nous avoir proposé des expositions d’une telle qualité ! J'étais sorti du Musée sur un petit nuage, émerveillé par tant de beauté. N’avez-vous pas vous aussi votre propre carnet de voyage ? Allez, osez, faites le pas, quelques feuilles volantes, un cahier d’écolier suffisent. Notez vos impressions, vos souvenirs. Laissez-vous allez à esquisser quelques croquis… et pourquoi pas un jour, à l’occasion d’une fête, pour votre anniversaire, vous offrir une boîte d’aquarelles. Autrefois, les Anglais qui effectuaient le petit ou le grand tour de la Méditerranée ne se séparaient jamais de leur boîte d’aquarelles ! Que de chefs d’œuvres ont ainsi été réalisés ! Savez-vous qu’il existe, sur ce principe, aux éditions Gallimard, une très jolie collection, intitulée « Carrés de jardin » ? Des textes comme écrits à la main, la plume à l’encrier, accompagnés de romantiques et poétiques aquarelles. Vient de paraître : « Les jardins du Musée du Quai Branly ». Je vous recommande absolument la visite de ce Musée des Arts Premiers des Amériques, d’Asie, d’Afrique et d’Océanie, à Paris, tant pour son architecture que pour ses collections sublimes. Quelques autres titres : « Le parc de la Tête d’Or », « La bambouseraie », « Le jardin de l’île de Batz », « « Val Rameh », Une incitation à d’autres beaux voyages.

Danielle Mitterrand Mémoires



Passionnant ouvrage que ce recueil des mémoires de Danielle Mitterrand. Peu importe vos idées politiques, que vous soyez de gauche ou de droite ! Ce qui compte ici c’est sa version de l’Histoire. Car l’épouse du Président de la République François Mitterrand ne raconte pas seulement les étapes essentielles de sa vie, elle se retourne aussi sur le passé de la France, relate beaucoup d’événements trop facilement oubliés. La seconde guerre mondiale, la résistance, la défense de la laïcité... Avec des pages mémorables, notamment la 173 : un train, un contrôle de papiers d’identité, un soldat allemand… Emotion. Si elle voue un culte indéfectible à son grand homme et maintient quelques zones d’ombres, elle garde une pudeur résolue sur sa vie privée. Son engagement en faveur des plus démunis puis son combat inlassable afin que l’eau potable soit accessible à tous sur notre planète sont à saluer : « Le droit d’accès à l’eau potable devra être inscrit dans toutes les Constitutions, comme un droit de l’homme. » Une absolue priorité à l’heure où le destin des humains sur Terre est menacé. Madame Mitterrand, reposez en paix.

Auteure Indienne





Quel bonheur, à chaque fois, de découvrir un nouvel auteur que l’on ne connaissait pas encore ! Vous savez un de ces écrivains dont on se dit qu’on lira tous leurs romans avec délices, dont on attend la sortie avec impatience et parfois frénésie. Lesquels ? Vous connaissez ma prédilection pour les Japonais et Chinois, souvent édités aux éditions Picquier, des merveilles. Désormais il faudra compter avec Shashi Deshpande. Née en 1934 en Inde du Sud, cela fait plus de trente ans qu’elle donne la parole aux femmes autrement murées dans le silence. Silence de la peur. Silence de la tradition. Eveilleuse de conscience, Shashi Deshpande a reçu de nombreux prix littéraires. Dans la maison familiale, Manjari, une jeune femme, découvre le journal laissé par son père après sa mort. C’est comme un écheveau aux fils emmêlés, dont elle va tenter de défaire patiemment les nœuds. Afin de comprendre le passé pour mieux vivre le présent et envisager l’avenir. Afin de choisir. Dans « Après la pluie » retentit une voix dont vous vous souviendrez. Longtemps.
Après la pluie. Par Shashi Deshpande. Editions Philippe Picquier

Biographie Stendhal




Pour découvrir des biographies, la collection Folio est idéale. Je dévore tous les ouvrages au fur et à mesure de leur parution. Bien écrits et érudits, c’est meilleur que les plus gros pavés et autrement plus digeste. Bon, je me suis pourléché les babines à la lecture de ce « Stendhal » par Sandrine Fillipetti. Tiens, je vais même le relire pour le plaisir. L’ennui, avec ces grands auteurs que l’on a étudié à l’école, c’est qu’on croit tout connaître d’eux… et l’on se trompe. Vous verrez par exemple qu’Henri Beyle, dit Stendhal (1783-1842) c’est bien plus que « La chartreuse de Parme » et « Le Rouge et le Noir » ! Un militaire engagé dans les campagnes napoléoniennes, anticlérical et récolté, consul en Italie, éternel amoureux transi, il est en perpétuelle quête de lui-même et ne cesse de disséquer avec mordant, avec ironie, l’âme humaine. Vous le croyez terriblement classique ? Lors de leurs parutions, ses écrits choquent et dans ses notes, il revendique le droit d’inventer les mots qui lui chantent et ne cesse de s’exprimer en franglais : « I am blasé ». Vous avez dit moderne ?
Stendhal. Par Sandrine Fillipetti. Folio Biographies

Kandinsky le génie




Ceux qui ont vu au mois de juillet 2009 l’exposition Kandinsky au Centre Pompidou à Paris auront grand plaisir à retrouver l’artiste dans cette édition hors-série. Les autres se feront une joie de découvrir un génie. La collection Découvertes Gallimard. propose une nouvelle façon de lire, ouvrez, dépliez, lisez ! Ce côté ludique et cette riche iconographie plaisent beaucoup aux enfants et adolescents. Une bien agréable façon de les amener à la rencontre de l’art. Ce qui peut devenir qui sait une véritable passion. Vassili Kandinsky (1866-1944) fut l’un des grands professeurs de la célèbre école du Bauhaus. Théoricien, il a su mettre en mots sa pensée et élaborer une nouvelle science de l’art : « Du spirituel dans l’art » (1911) et « Point et ligne sur plan » (1926) expliquent avec brio la nécessité du passage de la figuration à l’abstraction. Edités aujourd’hui en poche chez Folio, ces textes ne sont pas toujours d’accès facile. Aussi Olga Medvedkova met-elle par son essai limpide et éducatif la pensée de Kandinsky à la portée de tous.
Kandinsky le peintre de l’invisible. Par Olga Medvedkova. Découvertes Gallimard.

vendredi 13 janvier 2012

TBJ Au Pays












Tahar Ben Jelloun nous avait ému avec « Sur ma mère », dans lequel il décrit la longue agonie puis le décès de sa mère. Dans « Au pays », il retrouve les mots simples, ceux qui touchent et vont droit au cœur. Ouvrier en France durant de longues années, Mohamed va être mis à la retraite. Il ne comprend plus ses enfants, devenus des Français, l’écart s’est creusé. Mohamed a toujours vécu dans son monde à lui, et souvent, c’est le vide, plus de routine qui endort les angoisses du quotidien. Est-ce que revenir au pays sera la bonne solution ? Avec son ton naïf et sa manie de dire sa vérité, Mohamed fera grincer les dents de plus d’un lecteur ! Car il secoue les limites de la h’achouma. Sa description du hajj par exemple vaut son pesant de cacahuètes. Comme lui, vous aussi vous êtes fait voler vos babouches à la mosquée, un vendredi ? Latif a latif, le monde n’est plus ce qu’il était, yek ?







Au pays. Par Tahar Ben Jelloun. Editions Gallimard. 210 DH et en poche chez Folio

jeudi 12 janvier 2012

Civilisation Musulmane Universelle








Ingénieur, Tajeddine Bennani-Karim est également chercheur et écrivain. Son premier livre « Trait d’union » a intégré la science-fiction dans la tradition musulmane, un sujet qui lui est particulièrement cher. Fruit de longues et patientes recherches, son nouvel essai présente une vue d’ensemble de la civilisation musulmane, des origines à son avenir, fait appel à son « renouveau corps et âme », étudie la « Révélation, la Raison et la Science » avant de nous expliquer les « Lois Universelles ». Un essai solide et très érudit, salué ainsi par Mahdi Elmandjra : « un texte limpide qui se lit avec un grand plaisir ». Faisant appel aussi bien à Ibn Rochd qu’à Ibn Khaldoun, l’auteur incite le lecteur à aller de l’avant, pour le meilleur, afin de retrouver la splendeur de la civilisation musulmane, riche de promesses. En tout premier lieu, c’est en soi-même que le changement doit s’effectuer : « Dieu ne change l’état d’un peuple que s’ils changent ce qu’il y a en eux-mêmes ». (Coran 13.11)



Une civilisation musulmane universelle. Par Tajeddine Bennani-Karim. Editions Wallada/Tawhid 85 DH

mercredi 11 janvier 2012

Folklore marocain




Connaissez-vous les éditions du Sirocco à Casablanca ? Oui, alors vous allez vous régaler avec cet « essai de folklore marocain ». Non ? Rendez-vous dans une bonne librairie et achetez tous les titres parus ! Vous savez que j’ai été enthousiasmé et séduit par le beau livre sur James McBey. Emballé par le récit du voyage en France de l’ambassadeur Abdelhadi Tazi dans les années cinquante. Que j’ai dévoré les deux autres ouvrages réédités de la Doctoresse Légey. Des coups de cœur que je voudrais partager avec vous. Médecin au Maroc dès 1910, et pendant plus de 25 ans, la doctoresse, qui parlait arabe, a été attentive à la vie marocaine. Aujourd’hui ses ouvrages ont acquis, en plus de leur valeur ethnologique, une grande valeur historique. Lors d’un colloque en 2007 l’historien Abdelhadi Tazi, membre de l’Académie du Royaume, recommandait la création d’un Observatoire National des Us et Coutume du Maroc, dont l’une des premières tâches pourrait être la constitution d’une bibliothèque rassemblant tous les écrits sur ce thème. Une magnifique initiative.











Essai de folklore marocain. Croyances et traditions populaires. Par la doctoresse Légey. Editions du Sirocco. 115 DH






mardi 10 janvier 2012

Chronique Le goût de lire

Vous souvenez-vous quand vous étiez enfant et que vos parents vous racontaient des histoires, le soir, au lit ? Pour vous, ils inventaient des personnages, des contes merveilleux, le petit lapin ou la coccinelle. Ils vous lisaient des livres et vous n’en aviez jamais assez : «S’il te plaît, lis encore, maman ! » Il est vrai qu’à l’époque la télé n’avait pas pris place sur l’autel dans le salon et que la lecture avait encore des lettres de noblesse. Mais ce plaisir que nous avions, d’imaginer, de créer nous-mêmes la suite de ces récits, offrons-le aujourd’hui encore à nos propres enfants. Sans pour autant leur enlever consoles, écrans et internet, ne les privons pas de ce bonheur ! N’oublions pas qu’il existe au Maroc des maisons d’éditions spécialisées dans l’enfance, aux riches catalogues, qui puisent dans notre patrimoine traditionnel tout en abordant les sujets les plus actuels et modernes. Ainsi Yomad, à Rabat, dirigée par Nadia Essalmi et Yanbow al Kitab à Casablanca sous la houlette d’A. Alaoui Hachimi, qui organise des ateliers pédagogiques au Carrefour des Arts et a créé une très belle collection. Et même les éditions Tarik qui viennent de publier « Kalila wa Dimna ». Emmenez donc vos chers petits dans une librairie et laissez-les choisir eux-mêmes. Encouragez-les à écrire eux-mêmes leurs rêves, développez leur imagination, offrez-leur papier et crayon et laissez-les dessiner. Leur donner le goût de lire, d’écrire, de créer est un magnifique cadeau qui leur sera utile toute leur vie durant. Et si vous ne deviez choisir qu’un seul ouvrage, optez bien sûr pour « Le petit Prince » de Saint-Exupéry ou bien encore pour « Jonathan Livingstone le goéland » de Richard Bach.